Artiste Sculpteur
YBAH, Yvette Benitah, dite Ybah, est née en 1950. Sculpteur française dont l’œuvre est entièrement dédiée à l’étude des corps : leurs architectures, leurs expressions, et la lente métamorphose d’une chair au fil de l’existence.
C’est devant la Pietà de Michel-Ange, à Rome, que se révèle son désir de sculpter. Elle arrive à Paris depuis l’Algérie à l’âge de six ans, en 1956.
Sa vocation s’éveille au cœur d’une famille où l’art circule comme un héritage, l’influence d’un grand père sculpteur sur bois marque durablement son regard et sa main.
Jeune adulte, elle s’affirme dans la mode et la création de vêtements, apprenant à façonner le volume et le drapé comme on sculpte une figure. Elle crée des poupées de chiffon qui remportent un vif succès, témoignant déjà de son goût pour la matière habitée et la mémoire des formes.
Le dessin reste pour elle un fil intime : il la relie au corps et aux êtres d’une façon profonde et silencieuse.
Issue de l’École nationale supérieure des Arts Appliqués Duperré à Paris et au Lycée Languier d’Éu, chemine, entourée de maîtres qui savent écouter la pierre et le temps : Patrick Bintz, Jean-Luc Ducreux, Jean-Charles Ménardis, Philippe Sene, et d’autres, pour nourrir son savoir et son sens du fragile.
Ybah apprend et approfondi diverses techniques : modelage, dessin, gravure, peinture, taille directe, patines, moulages à cire perdue et en silicones, tirages en résines ; afin de maîtriser la matière et de s’ abandonner pleinement.
Le travail de la terre, puis d’autres matériaux, permet à Ybah d’aborder le corps et les êtres qui l’habitent, vibrant sous ses doigts. Ses expositions invitent à écouter ce que ses œuvres murmurent, si l’on sait les écouter et les apprivoiser.
Ybah, talentueuse et reconnue, réussie de façon remarquable à donner toute sa force et sa sensibilité à la terre. Ses personnages harmonieux, élégants, gracieux et poétiques sont travaillés de façon très spontanée, totalement instinctive, sans réflexion mais surtout avec le plaisir. Ses croquis réalisées au départ, servent seulement à comprendre la pose d’un corps et son anatomie. Avec ses gestes précis et puissants la figure change au fur et à mesure de son élaboration.
Sa vision artistique privilégie la fragilité du vieillissement : dévoiler les excès de chair, la plénitude des seins, la profondeur des rides, la tension des muscles, autant de traces qui racontent l’histoire d’un corps ayant traversé les tempêtes de la vie. Indéniablement, les cicatrices du temps s’inscrivent dans nos chairs et dans nos regards.
Active depuis 1994, Ybah s’est imposée comme artiste professionnelle dès 2012. Elle a été exposé à l’échelle nationale et récompensé à de nombreuses reprises : 16e Salon Art et Création de Saint-Georges-sur-Eure, Prix du Jury en 2013 ; Prix du Public du 19e Salon Art et Création de Saint-Georges-sur-Eure en 2014 ; 4e Foire d’automne d’Indre-et-Loire à Sainte-Maure-de-Touraine, Prix de Sculpture FDUC ; Foire d’automne de l’Iris en 2017. Elle a sculpté le buste de Marcel Proust installé au Jardin de Verdure à Illiers-Combray en 2017 et a été invitée d’honneur au salon de la sculpture de Courville-Sur-Eure la même année.
Par-delà les matières et les gestes, Ybah est une invitation à voir autrement : regarder la vie comme un champ à apprivoiser, un lieu où chaque peau porte une histoire, où chaque ligne peut devenir porte ouverte sur l’intime. Elle parle à qui sait écouter le langage des corps et des temps, et elle vous invite à entrer dans ces moments d’intimité où l’art, comme une respiration, nous rappelle que être vivant est un merveilleux dialogue avec le monde.
Lucia Mamos-Moreaux